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La Formule Secrète du Bonheur

« Je me suis mis à être un peu gai, parce qu’on m’a dit que cela est bon pour la santé ! »

Voltaire
Lettre à l’Abbé Trublet, 27 avril 1761

Définition théorique du bonheur

Le bonheur est une notion clé pour l’humanité et pour chacun d’entre nous. Selon Wikipédia : « c’est un état émotionnel agréable, équilibré et durable dans lequel se trouve quelqu’un qui estime être parvenu à la satisfaction des aspirations et désirs qu’il juge importants. »

Dans cette définition, on nous dit que le bonheur est un état durable. Pourtant, il est souvent fugace ! Je pense plutôt que la recherche du bonheur est une quête permanente. Une autre difficulté est de trouver un équilibre, de ne pas dépasser un point de bascule invisible. Nous voulons « nager dans le bonheur » mais pas s’y noyer ! Car la notion de bonheur, pour les biologistes est associée à la production de sérotonine. Surnommée « l’hormone du bonheur », la sérotonine régule nos émotions et joue un rôle dans la qualité de notre sommeil. Notre self-control dépend d’un niveau équilibré de sérotonine dans notre cerveau. Grâce à cet équilibre, nous avons plus tendance à éviter de prendre des risques pour maintenir une situation heureuse.

Trop de sérotonine et c’est le « flash », comme lors de la prise de psychotropes. S’ensuit une élimination du produit par le corps et c’est la « descente », une chute de sérotonine et de dopamine dans le cerveau. Ces mécanismes sont très bien décrits dans cette série d’article de MAAD Digital.

Le bonheur est donc un état personnel identifié par des facteurs biologiques et que la philosophie explore depuis des siècles.

Le Bonheur est le chemin

Petite philosophie du bonheur

Les premières traces de ce questionnement du bonheur nous ramènent comme souvent en Grèce ancienne. Pour les Eudémonistes, le bonheur est le but de la vie. Bah oui, tout simplement ! Mais le bonheur n’est pas la quête effrénée du plaisir. Les Eudémonistes laissent cela aux Épicuriens et aux Hédonistes… Si vous arrivez à placer ça dans un diner mondain, vous allez marquer des points sans pour autant atteindre le Nirvana 😉

A en croire le succès du livre de Frédéric Lenoir sur Spinoza, la philosophie du bonheur exerce encore un pouvoir immense sur nous. Récemment l’apparition en France d’un terme comme « Hygge » (prononcez hoo-gah) a titillé ma curiosité. Remontant au XVIII ème siècle, il pourrait se traduire par « intimité« . Il recouvre désormais le domaine des petits bonheurs simples des la vie. Malgré des siècles de réflexion, la formule secrète du bonheur semble pourtant insaisissable… Surtout vu de l’Hexagone !

Le Bonheur, c’était mieux avant…

Cela fait bien 30 ans que la France est championne du monde… du pessimisme ! En 2019, 70% des français se déclaraient pessimistes quant à l’avenir de leur pays. Pourtant, en privé, les français se déclarent heureux à 77% ! La France aime les paradoxes. Nous revendiquons notre gastronomie et Mc Donald’s engrange ici ses meilleurs profits. Nous avons une protection sociale proche des pays scandinaves et l’optimisme d’un yéménite…

le bonheur demain
Une indispensable sculpture à la tronçonneuse ! Le départ du bidasse. Effectivement, le bonheur sera pour demain voire après-demain (si tout se passe bien !).

La raison de ce pessimisme semble naitre d’un sentiment partagé d’injustice et d’inégalité qui a énormément augmenté dans l’intervalle. En effet, selon une étude de l’Institut Montaigne, près de la moitié des français ont des fins de mois difficiles. L’Express rapporte que 37% de la population interrogée a été à découvert de manière chronique au cours de l’année écoulé. A contrario, seulement 19% affirment avoir une capacité d’épargne. L’analyse de l’Institut Montaigne au niveau régional laisse apparaitre une situation très contrasté.

Dans les classement internationaux, le pays est à la 23ème place pour le niveau de bonheur de ses habitants. Loin derrière le Costa-Rica, derrière les Émirats Arabes Unis et Malte et juste derrière le Mexique…

De l’importance d’être heureux

Pourquoi est-ce si important d’être heureux ? Quel est l’impact global du bonheur ?

La rédaction de l’indispensable site Doctissimo a compilé des méta-études sur les effets du bonheur sur la santé. Les gens heureux vivent plus longtemps, en meilleure santé physique et mentale. De plus, ils cicatrisent mieux après une opération. Le bonheur augmente également la tolérance à la douleur ou à une maladie chronique. L’impact économique du bonheur est incalculable mais bien réel.

Rappelons-nous également que plus nous sommes heureux, plus notre niveau de sérotonine dans le cerveau est élevé et stable. Cette constance améliore notre self-control et donc notre impulsivité. Grâce à ce niveau équilibré de sérotonine, nous sommes moins agressifs. Peace, Love and Happiness !

Alors, tout cela est bien beau mais comment fait-on pour être heureux ? Y’a t’il une formule secrète du bonheur ?

La Formule secrète du Bonheur

Quelle que soit la génération, lorsqu’on nous interroge sur ce qui ferait notre bonheur, les réponses restent quasi-immuables. Argent, célébrité, travail…

Mais si l’on écoute l’excellent TED X de Robert Waldinger, on découvre une autre voie. D’après ce psychiatre américain, la formule secrète est simple !

Robert Waldinger est le 4ème responsable de recherche à poursuivre la plus longue étude sur le bonheur des adultes. Depuis 1938, 724 hommes sont suivis par les chercheurs. 60 d’entre eux sont encore en vie, à plus de 90 ans.

Ces hommes venaient de 2 groupes sociaux très éloignés : des étudiants de deuxième année d’Harvard et des adolescents pauvres de Boston. Tous les 2 ans, ils se soumettent à différents tests (questionnaires généraux, examens médicaux…). Leur entourage (femme et enfant) est également sollicité.

Outre les conséquences positives du bonheur sur le corps et le cerveau, les chercheurs ont isolé un facteur récurrent du bonheur : les relations. En effet, les individus en meilleure santé sont aussi les plus engagés socialement. Ce n’est pas le nombre d’amis sur Facebook mais la qualité des liens qui conditionne ce résultat. Lien marital, familial ou plus large, l’essentiel est d’investir du temps dans ces relations.

Le bonheur, c’est prévisible !

Deux autres éléments ressortent de cette étude au long cours. Tout d’abord la prédictibilité du niveau de bonheur à 80 ans. En étudiant la qualité des relations sociales à 50 ans, les chercheurs d’Harvard peuvent prédire de manière fiable le futur niveau de bien-être de l’octogénaire !

Cela rejoint d’une certaine manière les propos de Charles Martin-Krumm et d’Ilona Boniwell dans leur livre « Pour des ados motivés ». Ces deux spécialistes de la psychologie positive citent le travail de Sonja Lyubomirsky. Selon cette psychologue américaine, 50% du niveau de bonheur d’un individu est d’origine génétique. Les circonstances de la vie ne représentent que 10% du total. Cela explique sans doute pourquoi les gagnants du Loto retournent rapidement à leur niveau de bien-être initial. Même les paraplégiques et tétraplégiques reviennent quasiment au niveau de bien-être antérieur à leurs blessures !

Le malheur aussi, parfois…

Toujours selon Charles Martin-Krumm et Ilona Boniwell, certaines conditions sont plus rédhibitoires au bonheur. Certaines circonstances de la vie impactent durablement notre bien-être. En tête de ces limites au bonheur viennent le veuvage, l’injustice ou la solitude.

Avec l’injustice, nous retrouvons une des inquiétudes principales des français. Cette injustice a largement nourrie le mouvement des Gilets Jaunes.

La solitude est plus inattendue quant à ses effets ravageurs. Dans son TED X, Robert Waldinger nous dit que la solitude subie est un poison pour le cerveau. Il nous révèle également que 20% des américains se sentent seuls ! Il ne s’agit pas que de personnes isolées. Effectivement, cela concerne aussi des personnes entourées de relations toxiques. Cette solitude est un facteur de dégénérescence précoce du cerveau et de mort prématurée. L’Humain est un animal sociable.

Mais au fait, dans le calcul de Sonja Lyubomirsky sur le niveau de bonheur, il nous manque 40% ?

C’est loin le Bonheur ?

A nous de jouer !

Que représentent ces 40% restants ?

Ils représentent toute la partie sur laquelle nous avons un impact : les activités intentionnelles. Ce sont nos efforts et nos engagements afin d’élever notre niveau de bien-être. Pour caricaturer, on peut choisir de se dire que notre vie est à moitié nulle ou à moitié géniale !

Il faut également distinguer le niveau de bonheur du bien-être. Le bonheur est plus complexe et métaphysique. En outre, de nombreuses études ont apporté la preuve que le niveau de bonheur n’avait que peu de lien avec la fortune d’une personne. Passé les échelons primordiaux de la hiérarchie des besoins de Maslow (un toit, de l’eau et de la nourriture, la sécurité…), l’argent perd rapidement son effet de levier.

Toujours selon Charles Martin-Krumm et Ilona Boniwell, « notre bien-être dépend beaucoup plus de nos attitudes, des choses que nous décidons de remarquer et de prendre en compte, de nos intentions et de nos pratiques délibérées ».

La balle est donc dans notre camp. Ces deux auteurs parlent de développer des « compétences nécessaires au bonheur« . Par notre action positive, nous pouvons donc « changer notre manière de ressentir et de penser« . Donc, on ne pourra plus dire comme Cali « C’est quand le bonheur ? ».

3 compétences à développer

La psychologie positive s’intéresse de près au bien-être, première étape vers le bonheur. Parmi les compétences nécessaires au bien-être, Krumm et Boniwell en citent 3 principales.

  • La méditation de pleine conscience
  • La gratitude et les remerciements
  • Le pardon
  • La méditation

Dans mes lectures, je constate quasi-systématiquement que les personnes qui atteignent un très haut niveau d’achèvement et de bonheur pratique un type de méditation très régulièrement. Les effets sur le cerveau sont associés à la réduction des impacts négatifs et au renforcement des aspects positifs. L’idée n’est pas de développer ici les différentes écoles de méditation car je ne suis pas (encore) expert en la matière. Je vous laisse donc à votre pleine conscience ou vos mantras…

  • La gratitude et les remerciements

La gratitude est une composante centrale de la psychologie positive. Elle nous permet de valoriser les évènements positifs, même infimes de notre quotidien. Dans notre famille, nous avons été surpris par la puissance d’un exercice quotidien : le carnet de gratitude.

Laissez-moi vous raconter une petite anecdote personnelle. Notre fille de 12 ans est dotée d’un caractère fort. En effet, un des traits marquants de son esprit est de souvent penser à ce qu’elle manque, à demain plutôt que maintenant. Il en résulte une profonde frustration au quotidien et une difficulté à se réjouir de l’instant. Nous lui avons suggéré de tenir un petit carnet de gratitude où elle note chaque soir ses 3 instants de bonheur de la journée. C’est parfois quelque chose qui peut paraitre insignifiant comme un sourire échangé au cours de la journée ou le hululement de la chouette à son arrêt de car le matin…

A notre grande surprise, elle poursuit avec constance cet exercice ! Le résultat est vraiment puissant : une humeur plus contrôlée, un niveau de satisfaction en hausse vertigineuse et une habitude vite prise. Les rares moments où elle ne tient pas son carnet, nous le remarquons rapidement !

  • Le pardon

Trop longtemps resté dans la sphère religieuse, le pardon gagne en puissance lorsqu’on le dirige vers soi-même autant que vers l’autre. Ses effets identifiés par la recherche sont la réduction de la colère, de la négativité, de l’angoisse et de la dépression.

J’avais découvert son impact dans le livre de Jack Canfield « The Success Principles ». Je l’ai mis en pratique dans ma vie personnelle et j’ai pu constaté les bénéfices quasi-immédiats de ce principe.

Du bien-être au bonheur

Pour finir, je vois une quatrième compétence à adopter d’urgence pour compléter ce que nous disent Charles-Martin Krumm et Ilona Boniwell. Le RIRE !

En effet, lorsqu’on met en pratique l’ensemble des éléments précédents, nous devons veiller à ne pas tomber dans du self-monitoring, de l’autocontrôle permanent. Sinon, le risque est de passer à côté du bonheur malgré le bien-être.

Les effets du rire sur le cerveau et le corps sont maintenant bien connus. Je pense à cet homme qui s’est soigné d’une grave maladie en s’administrant une cure de films comiques et de sketchs d’humoristes à son retour de l’hôpital. Après plusieurs semaines de cure, son état s’était vraiment amélioré et son cerveau complétement modifié. Longévité, résistance à la douleur…

Il parait que nous rions moins qu’il y a 50 ans… Le rire est-il en danger ? C’est à nous de le protéger, de lui réserver des bastions. Il parait que nous rions moins avec l’âge… Alors fréquentons des plus jeunes ! Ainsi, nous développerons nos réseaux sociaux chers à Robert Waldinger !

Je suis persuadé que le rire franc, généreux et partagé est une forme ultime de bonheur ! Et, contrairement au dicton, vous n’allez pas « mourir de rire » mais au contraire prolonger vos instants sur Terre !

Que les Forces soient avec Vous !

Guillaume Le Penher