Douance, précocité, surdouement… Si vous avez un enfant précoce, vous connaissez forcément ces termes issus de la psychologie. Depuis quelques années, nos connaissances sur le sujet ont fait un bond. Pourtant, il subsiste encore des idées reçues à leur encontre. Les enfants précoces sont encore loin d’être intégrés pleinement à la société. Beaucoup de parents se demandent comment les aider à mieux vivre leur différence.
Aujourd’hui je suis tombé sur la rediffusion d’une émission de radio qui m’a particulièrement intéressé. Il s’agit de l’émission « La tête au carré » de Mathieu Vidard (sur France Inter) qui invitait la psychologue et conférencière Arielle Adda. Cette émission avait pour but de démystifier ce thème tout en apportant des pistes d’accompagnement pour les parents.
1/ Arielle Adda
Arielle Adda est une spécialiste des « hauts potentiels », enfants mais aussi adultes. En effet, certains découvrent tardivement leur capacité au-dessus de la moyenne. Cette prise de conscience donne un éclairage particulier à de nombreux événements de leur vie personnelle, affective et professionnelle. Arielle Adda a longtemps publié dans le journal de l’association Mensa France (de 1977 à 1998).
Mensa est une association internationale qui a pour vocation de rassembler les 2% les plus « intelligents » de la planète. Par cette fédération, l’association entend promouvoir la paix et la recherche, notamment sur la nature. Madame Adda exerce aujourd’hui en cabinet afin de conseiller adultes, parents et enfants face à ce défi que représente souvent la précocité.
2/ C’est quoi un enfant précoce ?
De nombreux parents se demandent si leur enfant ne serait pas en avance par rapport à ses camarades. Il existe, c’est vrai, des signes qui peuvent alerter sur ce phénomène : votre enfant marche très tôt, il est vraiment très éveillé ou développe un langage complexe. On dit que les premières années de vie sont cruciales pour le diagnostique. Toutefois, le seul moyen de confirmer ses soupçons est de faire un test chez un psychologue. Les tests de QI, par exemple, offrent une grille de lecture du niveau d’abstraction et de logique de la personne. Ils peuvent être passés à tout moment de la vie.
L’avance cognitive développée chez ces enfants peut se muer en difficulté sociale, affective et relationnelle. Nous connaissons tous des parents affolés ou désemparés face à la particularité de leur enfant surdoué. Alors que cela devrait être vécu comme une chance et une occasion inouïe de développement, la précocité engendre souvent de nombreuses difficultés pour l’enfant et ses parents.
3/ 3×8=21 !
Contrairement aux clichés parfois véhiculés par les films ou les médias, les enfants (ou les adultes) précoces ne sont pas des « singes savants ». Ne confondons pas avec certains troubles autistiques type « Forest Gump ». Arielle Adda les décrit plutôt comme des êtres sensibles. Ils peuvent, malgré leur étiquette de surdoué, flotter en calcul mental par exemple.
Les enfants précoces ne sont pas des bêtes de foire !
Ils adorent généralement la conversation avec des adultes ou des plus « savants » qu’eux. Cela les nourrit intellectuellement. Ils aiment les recherches et peuvent passer des heures, des jours à creuser un thème qui les passionne. Ces enfants ont une grande capacité à devenir des spécialistes d’un sujet pointu. Vous reconnaissez votre enfant dans cette description alors même que ses résultats scolaires ne sont pas forcément bons ?
4/ La société de la performance moyenne
Notre système éducatif ne tolère que les enfants moyens. Tous ceux qui s’éloignent trop de cette moyenne sont rejetés tôt ou tard. Je trouve étonnant de donner une image de l’école comme d’un lieu de compétition alors que les plus intelligents d’entre nous s’y sentent si mal… La compétition n’a court en fait qu’entre une frange restreinte d’individus dans la norme. On n’y encourage pas l’excellence, la stimulation intellectuelle et encore moins l’émulation.
Pour vivre heureux, faut-il vivre dans « la moyenne » ?…
Voici l’écueil majeur pour les enfants surdoués dans le système scolaire… Ils sont capables par exemple de lire et écouter un cours en même temps. Cela, on le comprend, déstabilise les professeurs. L’enfant se réfugie alors dans un mode de communication défensif voire parfois insolent et arrogant. Certains interrompent le cours en permanence pour apporter leur précision, relever un détail inexact ou simplement faire usage de leur art oratoire. Ils s’installent alors dans une négociation permanente qui rompt la fluidité de l’exposé du professeur et marginalise l’enfant. A partir de ce moment, sa souffrance grandit.
5/ Un don néfaste ?
Cet enfant talentueux est maintenant en échec scolaire…
Quel gâchis ! un tel potentiel ne doit pas être brisé. Malheureusement, à force de ne pas être challengés à l’école, les enfants surdoués peuvent se retrouver avec des mauvaises notes ou être confrontés à l’échec pendant leurs études. C’est une situation qu’ils vivent généralement très mal (hypersensibilité) et qui peut les conduire à la dépression ou aux pensées suicidaires. Un autre facteur délicat est leur difficulté à nouer des relations amicales avec des jeunes de leur classe d’âge.
Beaucoup de parents d’enfants précoces se démènent pour trouver des solutions. Ils lisent, consultent, discutent et se rendent compte aussi qu’il n’y a pas de solution miracle. Pourtant, il existe des pistes pour leur venir en aide.
6/ Renouer avec la vie
Arielle Adda explique par exemple que bien souvent ces enfants se décrivent comme « anormaux ». Ils se stigmatisent donc eux-mêmes. Elle conseille aux parents d’organiser des rencontres avec d’autres enfants comme eux. Cela peut s’organiser via des associations ou en trouvant dans l’entourage des enfants précoces d’âge équivalent. Nous sommes des êtres sociaux et c’est un pilier pour notre développement psychologique et affectif.
Les enfants précoces ont encore plus besoin que les autres d’un environnement familial stable. Cela les aide à faire face à leurs émotions qui les submergent souvent. Aujourd’hui beaucoup de familles sont monoparentales. Il est donc d’autant plus important que les grand-parents, un oncle, une tante ou toute personne proche puissent être des référents pour l’enfant. Avoir un enfant surdoué est souvent un challenge et il ne faut pas hésiter à s’entourer.
7/ Surmonter l’échec
Beaucoup d’enfants précoces survolent leur scolarité avant de perdre pied plus ou moins rapidement. Au fil du temps, sans motivation, le cerveau devient paresseux. Comme l’enfant précoce n’a souvent pas besoin de travailler pour apprendre pendant les premières années, la léthargie s’installe…
Le problème, c’est que le jour où il faudrait enfin le solliciter pour faire face à un examen ou de nouvelles connaissances, le cerveau est devenu tout mou. Comme il se comporte comme un muscle, il lui faut de l’exercice ! Sinon, il devient tout flasque comme du fromage blanc…
Il faut donc donner le goût de l’effort très tôt à ces enfants. « Donnez-leur des activités qui les stimulent » nous dit Arielle Adda. Exposés, recherches, discussions profondes, jeux d’échecs ou de go, tout est bon pour entrainer leur cerveau.
8/ Accompagner la réussite
Il existe beaucoup de techniques pour aider un enfant précoce à faire face à son particularisme. La pratique des Arts Martiaux comme le judo peut l’aider à mieux maitriser ses émotions. De plus, ces sports demandent un effort constant afin de progresser. Les cérémonies de remise des ceintures sont également autant de moments intenses qui produisent des effets à long terme sur la psychologie de l’enfant (estime de soi, récompense de l’effort…).
Une autre chose importante à faire avec un enfant précoce est de l’accompagner dans ses apprentissages scolaires en lui donnant des méthodes. C’est vrai qu’il est tentant de laisser en autonomie un enfant qui semble réussir très facilement à l’école. Pourtant, vous ne pourrez pas détecter les prémices du décrochage. En le suivant et en lui donnant des méthodes de mémorisation claires (répétition, écriture…), vous prévenez ainsi l’échec scolaire et la marginalisation.
9/ Un ultime et précieux conseil !
Si vous suivez ce blog régulièrement, vous connaissez mon attachement au développement personnel lié à nos talents naturels. Il s’agit là de notre plus précieux potentiel ! En les découvrant puis en les travaillant, nous les transformons en Forces.
Faites ce chemin avec votre enfant précoce. Aidez-le à découvrir ses Talents, ses qualités innées. Grâce à des tests comme le CliftonStrengths de Gallup (disponible en français, payant, à partir de 14 ans) ou comme le StrengthsExplorer (en anglais, payant, de 10 à 14 ans), vous pouvez rapidement connaitre le profil de talents de votre enfant.
Pour moi, les 3 ingrédients du succès de votre enfant sont un milieu affectif stable, une parfaite connaissance de soi allié à sa précocité intellectuelle…
Je vous le promets, c’est un parcours intellectuel ultra-stimulant ! Vous allez partagez ensemble un vocabulaire positif et précis pour envisager l’avenir plus sereinement. Cette connaissance de soi alliée à une précocité intellectuelle et un milieu familial rassurant est le plus sûr chemin vers la réussite ! L’aider à se connaitre lui-même est l’action la plus précieuse à mon sens que vous puissiez lui offrir.
Que les Forces soient avec Vous …
Et vos enfants précoces !
Guillaume Le Penher
Pour aller plus loin :
Le livre d’Arielle Adda » Psychologie des enfants très doués » qui rassemble ses chroniques https://amzn.to/2XGNZle
Comme le sujet ne touche pas que les enfants, Arielle Adda a aussi publié pour les adultes :
« Adultes sensibles et doués : trouver sa place au travail et s’épanouir »
Monique de Kermadec a également publié sur « L’adulte surdoué » :
L’association Française des Enfants Précoces : http://www.afep-asso.fr/index.php
L’association nationale pour les enfants intellectuellement précoces : http://www.anpeip.org/
A lire aussi sur ce blog : « La parentalité basée sur les forces »
Merci beaucoup pour ce sujet intéressant. Il est vrai que c’est un défi pour le haut-potentiel comme pour sa famille. Il y a quelques décennies, « ne tient pas sur sa chaise, passe son temps à regarder les nuages, fainéant, très nul en Maths » étaient des attitudes forcément montrant qu’on était un peu bête, en tout cas pas fait pour les études, arg!! Aujourd’hui, un enfant qui ne réussit pas à apprendre ses tables de multiplication est un vrai indice pour penser qu’il est à haut potentiel (même si cela paraît bizarre au premier abord) et faire un test chez un psy aide beaucoup, l’enfant voit que ses parents s’interrogent enfin sur son fonctionnement, veulent savoir comment l’aider, l’enfant se met peut-être à parler plus facilement de ce qui le tracasse… Les enseignants sont parfois également démunis face à un élève à haut potentiel, ce genre de formation ne leur est pas donnée, ils doivent se renseigner par eux-mêmes souvent et être ouverts aux propositions des parents ou du psy (avoir un cahier d’écriture, de dessins, un livre quand l’enfant en a besoin, alors que les autres planchent sur un exercice…) il est recommandé d’avoir de la flexibilité et de la confiance en l’enfant) . Parfois, un prof attend aussi que ce haut-potentiel sache tout et ait des 20/20 partout, erreur! Une pratique employée: ne dire aux profs que l’enfant est haut-potentiel que lorsqu’un vrai problème affecte la scolarité, le bien-être de l’enfant à l’école, sinon il a une pression folle car on attend toujours plus de lui… Voilà, pour le domaine scolaire….Reste la vie en dehors de l’école/travail pour les adultes, la relation à soi-même qui se vit aussi dans sa relation avec les autres et cela c’est un tout autre champ à investir également…
Merci pour ce commentaire argumenté et très complet ! Je n’ai qu’une chose à ajouter : un lien vers cet article du Ministère de l’Éducation Nationale au sujet de l’accueil au collège des enfants à haut potentiel.
https://www.education.gouv.fr/cid28645/la-scolarisation-des-eleves-intellectuellement-precoces.html